Découvrir d’autres modèles d’organisation des soins et des pratiques enrichies par les connaissances et les cultures ancestrales qui se sont développées autour de l’entente de voix, c’est l’ambition d’une équipe de soignant.e.s engagée dans le projet EDEN, qui s’est rendue en Océanie à la rencontre d’hôpitaux et de laboratoires de recherche où la psychiatrie centrée sur les personnes et l’entente de voix, sont au cœur des actions. Ils y représentent le Centre ressource.
C’est le Dr Robert Marchl, clinical head of integrated care, adult mental health services, à l’hôpital Middlemore, qui, le premier jour, leur permet d’envisager l’organisation de la psychiatrie à Auckland (Nouvelle-Zélande).
Le Dr Marchl a mis en exergue d’importantes différences avec l’organisation française : alors qu’en France le modèle de soin est en train d’évoluer mais reste encore très hospitalocentré, en Nouvelle-Zélande il ne l’est pas du tout.
De gauche à droite sur la photo : Dr Patrick Le Cardinal, Pr Nicolas Franck, Camille Niard (pair-aidante), Dr Robert Marchl et Baptiste Gaudelus (IPA) à l’hôpital Middlemore (Auckland).
Pour un territoire de santé d’environ 600 000 habitants, l’hôpital Middlemore dispose de 45 lits de psychiatrie pour les adultes de 18 à 65 ans (ce ratio reflétant la situation dans toute la Nouvelle-Zélande qui fait partie des pays de l’OCDE disposant du nombre de lits de psychiatrie le plus faible). Lorsque l’équipe du Centre ressource a visité le bâtiment consacré à la psychiatrie (qui a été livré il y a environ 5 ans), elle a pu constater que sa conception avait fait l’objet d’un soin tout particulier : espaces très étendus et ouverts sur l’extérieur. N’y transparait aucune impression d’enfermement.
L’immense majorité des prises en soins a lieu en ambulatoire en Nouvelle-Zélande. Sur le territoire de santé de l’hôpital Middlemore, celles-ci sont assurées par 5 « community teams ». Chacune de ces équipes est multidisciplinaire et comprend 4 psychiatres, 7 psychologues, 2 travailleurs sociaux, 1 ou 2 pair-aidants et 10 infirmiers. Leur action est renforcée par des équipes spécialisées - dont une équipe mobile se consacrant aux crises aiguës et une équipe d’intervention précoce pour les troubles psychotiques débutants (PEP).
Quant à la question sensible des prises en soin d’urgence et de la gestion de la crise psychiatrique, l’évaluation du degré d’urgence y est formalisée, ce qui permet de sécuriser les équipes et les personnes accompagnées et de rationaliser les délais de prise en soins.
Enfin l’articulation avec les médecins généralistes et avec les infirmier.ère.s fait l’objet d’un soin particulier. De nombreuses rencontres leur sont proposées en termes de formation continue, comprenant des échanges axés solution autour des cas complexes. Ce travail de réseau conditionne l’efficience du dispositif.
Ici, l’origine des personnes suivies est multiculturelle : 20 % d’entre elles sont Maories, 30 % sont Indiennes, 30 % occidentales et 10 % Asiatiques. Or, toutes les prises en soins accueillent la dimension culturelle, considérée comme un facteur décisif dans le partenariat patient-soignant et l’abord des personnes et de leurs troubles.
Une dimension culturelle néo-zélandaise qui met en avant les approches différentes employées au sein de cultures distinctes, expliquée par la psychologue Maeva Grzes. L’impact de la culture maorie apparait ainsi comme une thématique centrale du travail de Maeva Grzes.
Au cours d’un entretien avec le Pr Nicolas Franck, Maeva Grzes revient sur le parcours qui l’a menée en Nouvelle-Zélande, où elle est devenue psychologue spécialisée dans les « cas extrêmes » . Elle explique comment ses études à l’université Paris 8 lui ont permis une première ouverture à d’autres cultures et ont préparé son départ vers vers d’autres contrées, dont la Nouvelle-Zélande où elle s’est installée. Elle revient notamment sur les différentes façons de voir la psychiatrie en dehors de la France.