La résistance à la stigmatisation, un facteur du rétablissement

Une nouvelle étude issue de la cohorte REHABase met en évidence que plus le degré de résistance à la stigmatisation est élevé chez les personnes présentant un trouble psychique sévère, plus ces dernières présenteront des scores de qualité de vie, d’estime de soi et de bien bien-être élevés et un stade du rétablissement avancé. Autrement dit, la capacité à ne pas se laisser distraire, envahir ou décourager par les préjugés stigmatisants qui continuent de marquer les discours sur la santé mentale, constitue un facteur protecteur pour les personnes concernées.

Quelle méthodologie ?
693 patients ayant un trouble psychique sévère, suivis en psychiatrie ambulatoire, issus de la cohorte REHABase ont été inclus dans l’étude. Les patients présentant des troubles de la schizophrénie étaient les plus représentés (63,1 %). Les autres diagnostics étaient les suivants : troubles bipolaires (15,9 %), troubles de la personnalité borderline (8,7 %), dépression majeure (3,7 %) et troubles anxieux (2,5 %). Les évaluations prises en compte dans le cadre de cette étude comprenaient les échelles d’évaluation de la sévérité des troubles, de la qualité de vie, du bien-être, de la satisfaction des patients sur plusieurs domaines de leur vie quotidienne, le stade du rétablissement et plusieurs échelles d’appréciation des habiletés cognitives.

Quels résultats ?
Parmi les résultats de cette analyse transversale, un haut degré de résistance à la stigmatisation était associé fortement au sentiment de rétablissement personnel et à l’ensemble des conséquences positives du rétablissement. La résistance à la stigmatisation était par ailleurs associée à des facultés cognitives préservées et cela, sans incidence du genre ni de l’âge des patients.

Quelles implications ?
Cette résistance à la stigmatisation, mesurable avec l’échelle d’évaluation de l’auto-stigmatisation ISMI (Internalized stigma of mental illness) pourra ainsi être recherchée utilement dans le cadre d’un parcours de soins en psychiatrie, comme une force à mobiliser, ou un point de vigilance, puisqu’une résistance faible à la stigmatisation pourra révéler quant à elle des besoins spécifiques de réhabilitation psychosociale, comme la psychoéducation orientée rétablissement, les thérapies dites métacognitives qui permettent de se centrer sur le processus de la pensée et non seulement les contenus de pensée et travailler sur l’anxiété, et les interventions auprès des familles pour qu’elles se sentent elles-mêmes plus soutenues, légitimes et ainsi plus soutenantes.

Allons plus loin

Ces résultats revêtent plusieurs implications potentielles pour des études complémentaires. Ainsi, des travaux sont attendus, venant approfondir notamment les liens entre résistance à la stigmatisation, degré de reconnaissance et d’acceptation des troubles (insight) et rétablissement. La réhabilitation psychosociale peut-elle optimiser la résistance à la stigmatisation et comment ? Quels sont les impacts potentiels d’une meilleure résistance à la stigmatisation sur le rétablissement personnel et social des personnes ? Quelles caractéristiques de l’évolution de la résistance à la stigmatisation dans les trajectoires de réhabilitation psychosociale ? Autant de pistes que les investigateurs de l’étude invitent à explorer.

Source : Dubreucq, J., Plasse, J., Gabayet, F., Faraldo, M., Blanc, O., Chereau, I., Franck, N. (2020). Stigma resistance is associated with advanced stages of personal recovery in serious mental illness patients enrolled in psychiatric rehabilitation. Psychological Medicine, 1-11. doi:10.1017/S0033291720004055

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