La stigmatisation
La stigmatisation correspond à l’exclusion d’un groupe social des personnes jugées différentes de la « norme » majoritaire. Elle provient d’une méconnaissance et de préjugés concernant les individus stigmatisés, auxquels sont attribués certaines caractéristiques que le sociologue Erving Goffman nomme stigmates(1).
Les représentations sociales les plus fréquemment associées aux personnes souffrant de troubles psychiques sont(2) :
- L’irresponsabilité : Ces personnes ne seraient pas capables d’être responsables de leurs actes ou de leur état ;
- L’incurabilité : La guérison ou le rétablissement de maladies psychiques ne serait pas possible ;
- La dangerosité : Les personnes souffrant de troubles psychiques sévères, notamment de schizophrénie, sont suspectées d’être dangereuses et plus susceptibles de commettre des actes violents.
Ces représentations sont éloignées de la réalité, puisque la majorité des personnes souffrant de troubles psychiques même sévères sont conscientes de leur état et de leurs actes et sont plus souvent victimes de violences qu’elles n’en commettent. De nombreux témoignages de personnes rétablies de troubles psychiques sévères, y compris de maladies telles que la schizophrénie ou le trouble bipolaire attestent aujourd’hui de la réalité d’une possibilité de rétablissement dans ces maladies. Ces données sont confirmées par la recherche scientifique.
Les médias relaient fréquemment des préjugés sur la maladie mentale, ce qui renforce les représentations sociales citées, notamment à l’occasion de faits divers impliquant des personnes souffrant de troubles psychiques ou par l’utilisation métaphorique fréquente du terme de « schizophrénie » pour parler de double personnalité par exemple, ce qui ne correspond pas à la réalité de la maladie.
La stigmatisation est une source de souffrance importante pour les personnes concernées. Elle est à l’origine de comportements de discrimination et d’une exclusion importante.
Un individu stigmatisé peut également internaliser un vécu de stigmatisation, ce qui peut renforcer son isolement par un évitement de certaines situations sociales(3). C’est ce qu’on appelle l’auto-stigmatisation.
La stigmatisation et l’auto-stigmatisation peuvent constituer des obstacles majeurs au processus de rétablissement. Elles peuvent aggraver l’isolement des personnes, entraver l’insertion professionnelle ou l’accès au logement. Les phénomènes d’auto-stigmatisation impactent directement l’estime de soi, le sentiment d’auto-détermination et le pouvoir d’agir(4).
Comment la réhabilitation psychosociale peut-elle lutter contre la stigmatisation ?
La réhabilitation psychosociale permet de lutter contre la stigmatisation des personnes souffrant de troubles psychiques par les moyens suivants :
- En développant des pratiques de soins et d’accompagnement orientées vers le rétablissement des personnes ;
- En proposant aux usagers des programmes ayant pour objectif la lutte contre l’auto-stigmatisation (ex : Le programme Remed Rugby à Grenoble) ;
- En participant aux actions locales et nationales de lutte contre la stigmatisation (ex : Les SISM, le psytruck à Grenoble) ;
- En favorisant l’implantation de la pair-aidance dans les soins en psychiatrie par notamment la présence de médiateurs de santé pairs en partenariat avec le CCOMS
Ressources :
Le Psycom est un organisme public d’information, de formation et de lutte contre la stigmatisation en santé mentale
Références :
1. Goffman E. Stigmates : les usages sociaux des handicaps. Les éditions de Minuit. 1975.
2. Roelandt J-L, Caria A, Defromont L, Vandeborre A, Daumerie N. Représentations sociales du « fou », du « malade mental » et du « dépressif » en population générale en France. L’Encéphale. 2010 Jan 1 ;36(3, Supplement 1):7–13.
3. Thornicroft G, Brohan E, Rose D, Sartorius N, Leese M, INDIGO Study Group. Global pattern of experienced and anticipated discrimination against people with schizophrenia : a cross-sectional survey. Lancet Lond Engl. 2009 Jan 31 ;373(9661):408–15.
4. Sartorius N, Schulze H. Reducing the Stigma of Mental Illness : A Report from a Global Association. Cambridge University Press ; 2005.
Rédacteur : Sophie Cervello, Psychiatre au centre ressource