[Résumé d’article scientifique] Style d’attachement et rétablissement psychosocial des personnes avec schizophrénie

Style d’attachement et rétablissement psychosocial des personnes avec schizophrénie

La connaissance des déterminants positifs et négatifs du rétablissement est l’une des conditions d’un accompagnement satisfaisant des personnes ayant des troubles psychiques. Le rétablissement psychosocial est facilité par des valeurs telles que l’optimisme, l’espoir et le sens que l’on donne à sa propre vie. Ces valeurs sont en partie médiées par le style d’attachement, qui se construit dès les premières interactions avec ses proches au début de sa vie et se modifie ensuite au gré de l’élargissement du cercle relationnel.

On décrit classiquement quatre styles d’attachement : un style dit « sécure », prototype d’un attachement qui permet à la personne d’exploiter pleinement ses capacités de résilience, de bien être émotionnel, d’espoir et d’optimisme ; ainsi que trois styles dits « insécures » pouvant être de type évitant, anxieux ou désorganisé. L’évaluation du style d’attachement repose sur un entretien semi structuré avec les proches explorant la période pré morbide.
Des travaux récents ont étudié les liens entre le style d’attachement et des variables telles que l’intensité des troubles, la durée d’hospitalisation lors d’une rechute et le nombre de rechutes chez des personnes ayant une schizophrénie. Ils ont montré que les styles d’attachement insécures sont corrélés aux formes de schizophrénie ayant un pronostic péjoratif que ce soit en termes de sévérité des troubles ou de difficultés à établir une alliance thérapeutique de qualité et à s’engager dans les soins.
Van Bussel et al (1) ont réalisé une méta-analyse portant sur les liens entre le style d’attachement et le rétablissement des personnes ayant une schizophrénie. Les auteurs ont inclus à cet effet les études évaluant le style d’attachement et le rétablissement de personnes avec schizophrénie. Au total 28 études ont été incluses. Elles ont permis d’établir des liens entre ces deux dimensions : l’attachement insécure est globalement associé à des styles de rétablissement psychosocial moins adaptatifs avec de moins bonnes capacités sociales et individuelles. Le rétablissement social et le rétablissement personnel sont de moins bonne qualité lorsque le style d’attachement est anxieux ou évitant.
Ce retentissement pourrait être causé par les croyances dysfonctionnelles concernant soi, les autres et le monde lorsque l’attachement est de style insécure. Ainsi ces conceptions négatives de l’acceptation de la réassurance et de la sécurité dans les relations interpersonnelles pourraient résulter en des capacités cognitives sociales pauvres, des difficultés sociales et un rétablissement de moins bonne qualité.
Garijo et Montfort-Escrig (2) ont réalisé une analyse en réseau concernant les différents types de rétablissement, les dimensions symptomatiques de la schizophrénie (négative, positive et désorganisée) et les capacités cognitives. Ce type d’analyse se prête aux petits échantillons. Il a permis de montrer que l’impact du style d’attachement sur la symptomatologie est médié par les fonctions cognitives, et en particulier par la cognition sociale. Agir sur le style d’attachement permettrait ainsi d’améliorer les capacités cognitives sociales et ainsi d’améliorer le rétablissement symptomatique.
Varela et al (3) ont retrouvé des résultats similaires dans une étude transversale menée sur 51 patients ayant une schizophrénie. Ils montrent que le style d’attachement médie les capacités en théorie de l’esprit qui elle-même a des répercussions sur le rétablissement social.
Ces données récentes nous permettent de comprendre les interactions en réseau complexes liant les paramètres d’un rétablissement de qualité. Elles devraient permettre de définir de nouvelles cibles thérapeutiques pour promouvoir un rétablissement de qualité. Par exemple, les thérapies basées sur la mentalisation explorent le retentissement du style d’attachement sur les interactions sociales et elles pourraient ainsi compléter les thérapies cognitives (4 et 5) (6). Enfin ces données rappellent l’importance des interventions proposées aux familles des personnes ayant des troubles psychiques.

1. van Bussel EMM, Nguyen NHM, Wierdsma AI, van Aken BC, Willems IEMG and Mulder CL (2021) Adult Attachment and Personal, Social, and Symptomatic Recovery From Psychosis : Systematic Review and Meta-Analysis. Front. Psychiatry 12:641642. doi : 10.3389/fpsyt.2021.641642
2. Josep Pena-Garijo, Cristina Monfort-Escrig, The centrality of secure attachment within an interacting network of symptoms, cognition, and attachment dimensions in persons with schizophrenia-spectrum disorders : A preliminary study, Journal of Psychiatric Research, Volume 135, 2021, Pages 60-67, ISSN 0022-3956, https://doi.org/10.1016/j.jpsychires.2021.01.002. (https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0022395621000030)
3. Varela, L. F., Wong, K. H. T., Shergill, S. S., & Fett, A. K. J. (2021). Attachment styles moderate Theory of Mind differences between persons with schizophrenia, first-degree relatives and controls. British Journal of Clinical Psychology, 60(3), 339-356. https://doi.org/10.1111/bjc.12308
4. Brent B. Mentalization-based psychodynamic psychotherapy for psychosis. J Clin Psychol. 2009 Aug ;65(8):803-14. doi : 10.1002/jclp.20615. PMID : 19572277.
5. Brent BK, Holt DJ, Keshavan MS, Seidman LJ, Fonagy P. Mentalization-based treatment for psychosis : linking an attachment-based model to the psychotherapy for impaired mental state understanding in people with psychotic disorders. Isr J Psychiatry Relat Sci. 2014 ;51(1):17-24. PMID : 24858631.
6. Weijers J, Ten Kate C, Eurelings-Bontekoe E, Viechtbauer W, Rampaart R, Bateman A, Selten JP. Mentalization-based treatment for psychotic disorder : protocol of a randomized controlled trial. BMC Psychiatry. 2016 Jun 8 ;16:191. doi : 10.1186/s12888-016-0902-x. PMID : 27278250 ; PMCID : PMC4898403.