La réhabilitation psychosociale au service des soins de secteurs : une exigence de coordination renforcée
La réhabilitation au service des soins secteurs le 9 décembre 2019, ce sont quelques 100 professionnels de santé et de l’accompagnement des personnes souffrant de handicap psychique rassemblées pour penser collectivement la réhabilitation psychosociale et ses outils comme une ressource incontournable des soins en psychiatrie.
Une ressource probante tant pour les personnes souffrant de handicap psychique sévère que pour les professionnels qui souhaitent donner cohérence et continuité à leurs accompagnements.
On pourrait l’associer à une passerelle, un tremplin. Qu’elle se constitue en relais des soins de secteur ou qu’elle soit assurée en ambulatoire, la réhabilitation psychosociale et plus généralement les approches orientées rétablissement participent à une évolution portée par plusieurs années de transformation des pratiques, de plaidoyer, de recherche clinique, de formation, d’engagement militant.
La réhabilitation psychosociale, c’est la traduction des besoins des usagers de la psychiatrie en référentiels, en pratiques de remédiation et d’accompagnements des usagers vers le rétablissement. Elle incarne un effort d’attention inégalé aux besoins des personnes tels qu’ils les expriment. La réhabilitation psychosociale repose ainsi sur la confiance, interprofessionnelle, celle de la personne accueillie à l’égard des équipes qui l’accompagnent, et le rapprochement d’univers professionnels qui ont des choses à se dire et à mutualiser.
Des constats persistants
Le constat est sans appel : la réhabilitation psychosociale s’impose désormais comme un modèle probant d’accompagnement des personnes à handicap psychique sévère dans une dynamique de rétablissement mais elle est encore sous-investie par les équipes en psychiatrie, révélant un besoin accru de connaissances, d’expérimentations ou parfois faute de lisibilité des partenaires de la réhabilitation en présence.
Ainsi, bien que les données de la recherche viennent étayer régulièrement l’impact de la réhabilitation psychosociale sur les personnes, à travers l’espoir retrouvé, la restauration de l’identité propre, le sens donné à l’existence, la gestion de la maladie, le retour à une vie normale, elle intervient de façon encore trop tardive dans les parcours, tandis que ses perspectives comme le retour à l’emploi des usagers sont identifiées comme des besoins prioritaires des personnes. Aujourd’hui, seules 10 % des personnes diagnostiquées pour des troubles de la schizophrénie, exercent un emploi en milieu ordinaire.
Parmi les enseignements de 10 années de diffusion de la réhabilitation psychosociale au sein des équipes en psychiatrie, l’exigence de repérer plus tôt les personnes susceptibles de bénéficier de la réhabilitation psychosociale reste d’actualité.
Orienter davantage les personnes vers les structures médico-sociales relais pour des accompagnements en milieu ouvert et le renforcement de l’inclusion sociale des personnes, en est une autre. Aujourd’hui, les usagers accueillis en réhabilitation sont de plus en plus jeunes mais les orientations inadéquates persistent, faute de connaissances et de coopérations systématiques entre les services de jour, les services ambulatoires, les équipes mobiles. Seuls 8 % des personnes accueillies en sont au stade précoce de la maladie.
- Comment prévenir les ruptures sèches dans les parcours des personnes ?
Comment optimiser le repérage des personnes accueillies en psychiatrie dès les 1ers symptômes psychotiques ? - Comment faire de la réhabilitation une opportunité complémentaire proposée très tôt dans les parcours des usagers de la psychiatrie et non une option de dernier recours ?
Ces questions, majeures, restent l’objet de développements et d’expérimentation en cours, avec toujours le même enjeu de continuité des parcours, de développement de l’offre en ambulatoire et de prévention des hospitalisations qui ne seraient pas justifiées.
Ancrage écologique et Case management au service du rétablissement
La réhabilitation psychosociale implique une transformation de l’organisation des accompagnements et impactent les liens de coopération. Le concept de « Case Management », notamment, se diffuse dans les équipes, au gré de la diffusion des approches du rétablissement, avec la personnalisation des accompagnements et des équipes pluri-professionnelles qui viennent enrichir les parcours des personnes. Cependant, des formations spécifiques sur les principes du « Case management », ses modalités, en quoi il s’agit d’une expertise à développer dans les équipes qui permet de repenser la notion de parcours, de continuité dans les trajectoires, de valoriser la pluridisciplinarité, les évaluations écologiques, l’investissement de l’environnement partenarial, tout cela reste à renforcer localement et à systématiser.
L’équipe de Saint-Cyr a imaginé quant à elle un plan de rétablissement qu’elle expérimente auprès des usagers. On peut l’envisager comme une feuille de route pour que la personne et l’équipe qui l’accompagne aient des repères, les mêmes, sur le chemin à parcourir et le chemin parcouru, et permette d’anticiper les facteurs protecteurs et les facteurs de vulnérabilité propres à l’usager.
L’équipe mobile César expérimente et développe de son côté une forme opérante de Case management avec des référents de parcours qui se situent dans une dynamique d’ « aller vers » et apporte un soutien personnalisé aux personnes, au regard de leurs projets de vie et de leurs ressources et des limites qu’elles rencontrent à un temps donné. L’ancrage écologique des accompagnements y est prégnant.
Se pose alors la question, connexe, de la place de l’entourage et des aidants et la nécessité de les accompagner par la formation, à travers des programmes de psychoéducation des familles à soutenir l’usager dans son rétablissement (ex : Profamille).
Quels outils ?
Plusieurs outils sont à la disposition des professionnels qui souhaitent s’engager dans des approches orientées rétablissement, dont les TCC, l’ETP, la psychoéducation, remédiation cognitive. Le DU de remédiation cognitive porté par l’Université Lyon 1, a pour objectif pédagogique d’informer sur les techniques de remédiation cognitive disponibles en langue française et validées dans la schizophrénie, d’inscrire l’utilisation de ces outils de soin dans le contexte d’une prise en charge globale du patient, assortie d’une évaluation optimale et de former chaque participant à l’une de ces techniques à travers des cours théoriques, des TD et un stage pratique.
Autre temps de formation, la première édition du DU « Pair-aidance en santé mentale » a lancé sa première session à compter de décembre 2019. Cette formation est destinée à former des pairs-aidants qui favoriseront l’engagement dans les soins des personnes ayant des troubles psychiques sévères ou des troubles du spectre de l’autisme, grâce à des actions motivationnelles et psychoéducatives.
Les perspectives en Auvergne-Rhône-Alpes
La feuille de route pour la réhabilitation vise :
- Une densité plus forte de l’offre de réhabilitation, notamment à travers l’articulation entre réhabilitation sanitaire et médicosociale
- Une structuration régionale renforcée grâce au déploiement du PTSM
- Une diffusion plus massive des outils et bonnes pratiques du rétablissement pour un accompagnement des personnes à tous les âges de la vie et de la maladie
- Un repérage toujours plus précoce des besoins de réhabilitation dès les premiers épisodes psychotiques
- Une contribution appuyée au mouvement général de dé-stigmatisation du handicap psychique
- Un effort d’adaptation des échelles et évaluations proposées aux usagers pour faciliter leur appropriation
Cela passera par la multiplication des temps de formation et de sensibilisation, l’expérimentation, le partenariat, l’essaimage et la diffusion, le renforcement des capacités des acteurs locaux et des synergies entre eux pour maximiser l’impact social de la réhabilitation.