dé-CONFiture Maison : 7ème cueillette

Pour cette septième édition de dé-CONFiture maison, nous avons invité les participants à créer autour des ces trois thématiques :
- Thématique évasion : Réaliser son autoportrait ou le portait de quelqu’un (un voisin, une cousine, un ami, etc) ou encore d’un animal, une ville, un gâteau… bref, à vous de choisir le portrait physique et/ou psychologique que vous souhaitez créer !

  • Thématique corona : Nous sommes en déconfinement depuis une semaine. Y a-t-il du nouveau ? Un peu ? pas du tout ? Racontez-nous vos observations, vos inquiétudes, vos étonnements, voir vos émerveillements de ces premiers jours de déconfinement.
  • Thématique WTF/un peu barrée : Imaginez que vous êtes un crabe et que votre vie est faite de diagonale. Comment le vivez-vous ?

Découvrez leurs participations ci-dessous !

Les créations des ateliers d’écriture

"Route diagonale", Isabelle

Vivre en diagonale c’est :

  • prendre les chemins de traverse.
  • éviter une situation difficile.
  • suivre une ligne de fuite.
  • emprunter les sentiers les moins fréquentés.
  • marcher de travers avec ses travers.
  • rentrer chez soi et se retrouver chez le voisin d’à côté sans avoir été invité.
  • marcher sur les plates-bandes d’un autre.
  • se garer en épi à la manière des crabes.
  • partir à droite ou à gauche afin de conserver les distanciation sociales.
  • pas très pratique si l’on n’a pas les yeux placés sur les côtés.
  • se retrouver en permanence dans un exercice de mathématique,...
  • porter trop lourd le poids de sa propre carapace...ce qui nous fait prendre cette étrange direction...

"Déconfinement", Hugo

Avec ou sans médicaments
Libre de circuler normalement
Et de saluer l’autre gentiment
Il faut aller de lavant
Certains sont en deuil
Qu’il le veuille
Ou non
Ils sont dans la chanson
Je te souhaite ma condoléance
On a tous une autre chance
Il y en a qui sont passés à travers à l’avenue et auront droit au dessert
Certains sont encore contaminés
À tous de porter le masque sur le nez
Personne ne peut en rigoler
À vous de juger

"Il était grand parmi les petits", Hicham

Il était grand parmi les petits
Mais tout de suite rabaisser par les grands
Puis sauvé par une personne plus âgée
J’étais énervé
Alors qu’on jouer
Je me suis cassé la gueule
Donc je suis défiguré
Plus rien pouvait me sauver
Quand je me dégrader de plus en plus
Je me croyais perdu
Dans ma route, j’ai eu des accidents
Plaque, je n’ai plus de dents
Puis je me suis mis à tout casser
Pour pouvoir me casser
Donc ils m’ont enfermé
Pour me guérir

"Portrait pour trait", Mohamed

Invisible est le ressenti, elle qui est si belle, elle avait dans les cheveux toujours une fleur qui sentait la vanille, dans la ville elle rayonnait, personne ne lui rie au nez, trop sérieuse pour ça, elle avait jadis dix fois le charme d’une tentatrice. Elle médusait tout ceux qui la regardait. Son point faible se reflétait dans le miroir, elle qui n’arrête pas d’y croire le soir. Tout le monde voulait l’inviter à danser. Seule mois qui a de l’emprise sur elle, il suffit d’une d’une étincelle, pour la sculpter il faut plus que de la pate à sel, les courbes étaient profondes et sensuelles. Son niveau était top, pas mal de culture G. J’ai beau le dire c’était une déesse incarnée, encorné par le taureau dans l’arène, son charme se vendait en cornet, celui qui voulait la séduire n’est pas encore né.

"Auto-portrait de papier", Meido

La maison est faite de feuilles, d’accumulations de feuilles. L’écriture que nous pouvons à peine y lire est un monticule de mots dont le sens a quitté leurs enveloppes pendant longtemps. Réapprendre à marcher, à interpréter, à projeter. Ouvrir la fenêtre pour me sentir vivante, tenir debout dans cette réalité qui me paraît violente. Être encore au dépourvu face aux mutations, accepter les ressentis qui forment de nouveaux schémas. Les émotions, leur laisser l’espace de dire ce qu’il y a au fond.

J’ai déboulonné, désossé, la machine infernale qui m’habite, à l’aide de coup de pouce, de main, de bras de femmes et d’hommes suffisamment bons pour m’accompagner dans cet affranchissement. Les anciens conditionnements ont laissé place à de l’étonnement, les réflexes de pensée ont mué vers des réactions moins parasitées par « la colonie pénitentiaire ». Mon enfance n’est plus un frein à mon développement.

Je ne me justifie plus en tant que protagoniste d’un récit de la Kolyma. Monument aux morts de ces ruines en guise de fondation, je fais le deuil de mon impuissance et ne recherche plus la cohérence. Mon histoire débute sur un territoire bien miné, à moi d’y travailler la terre sans me faire exploser. Si tu sais comment faire, stp dis moi de quelle manière car jusqu’ici les balles traversent et la peau laisse passer la lumière.

Donc d’où viens-je, qui suis-je, où vais-je ? Je ne m’attends pas à trouver une réponse précise. Je ne m’attarde pas à construire un quelconque discours descriptif, je suis incapable de saisir les contours de l’être en une seule fois, un seul trait. La dysmorphie fait toujours partie de mon prisme. Et l’écriture n’est que la trace de cette quête distordue, altérée par l’état dans lequel ma perception évolue.

C’est ainsi que j’accepte de n’être que partielle, de vivre ces questions plutôt que tenter d’y répondre. Comme une géode en construction perpétuelle, dont les facettes s’étendent ou se replient selon de quel côté je me place, sur quel rocher je me pose. Car je vois ma conscience comme un phare limité à exposer ses récifs et dont le rayon ne peut éclairer le paysage dans son intégralité. Éduquer le regard à voir plus loin, plus proche et sans fin.

Les mots se dessinent à l’image d’un moi en ellipse... je ne fais que suivre la pensée cachée dans ce mystère en filigrane.

"Sur-confinement", Anonyme

Déconfinement…
Iels déconfiné’e’s.
je me confine,
sur-confine.
Ma sortie quotidienne, passée à la trappe.
Syndrome de la cabane dit France Inter.
Je me terre.
Finie la liberté, (ma liberté) de circuler sans
anxiété.
Les humain’e’s dehors tout à coup,
Les trottoirs foulés à nouveau,
Personne
ne respecte
dans la file d’attente du fleuriste
les distances de sécurité.

Pas de masques,
iels ne portent pas de masques,
me frôlent,
prennent de la place,
place que je considérai aussi mienne durant le
confinement.
Pour une fois, ma place, la possibilité d’exister
dans cet espace désormais encombré
Comme si disparition du virus.
Comme si
comme avant.
Pour les gens.
Moi dé-placé.
Alors la peur de sortir.
Mettre des barricades.
Un dehors désormais quelque peu effrayant.


Mais un peu mieux qu’en fin de confinement…
Un peu mieux parce que
retour au travail : pas d’un coup.
Progressif ? Régressif ? Transgressif ?
Affirmatif, petit à petit sinon écroulement.
Un peu mieux parce que
premier contact de mon corps avec un autre corps,
premier contact depuis le 13 mars,
premier lors d’une première séance de psychomot’.

Soignant’e’s en vrai maintenant
et pas (uniquement) derrière un téléphone ou un écran,
Salons de tatouage ré ouverts.
Toustes masqué’e’s,
moi masqué revennant peu à peu à la réalité.

Voir mes ami’e’s :
pas tout de suite,
doucement,
prudemment :
ne mettre personne en danger.
Apprendre à me déconfiner oui,
avec des gens pour me guider.

"Moi, V., en burn-out", Anne-Camille

Je ne suis pas si âgée que cela , ou du moins j’apprécierais que vous ne vous fiiez pas à mon apparence physique.

Certes, j’ai vu passer un certain nombre d’individus, toutes générations confondues : des bébés des soignants rendant visite à leurs collègues durant leur congé maternité au bienveillant pédo-psychiatre sur le point de prendre sa retraite, en passant par des cadres bien installés ou des étudiantes sur le point de démarrer. Chacun grandit plus ou moins longtemps aux côtés des enfants. Et il y a les soignants dits “du quotidien”. Ce sont eux avec qui je passe le plus clair de mon temps puisqu’on leur demande de composer avec mes qualités comme avec mes défauts ; j’ai cru comprendre que j’en avais un certain nombre, de défauts. Beaucoup aimeraient que je change : que j’aie un physique plus ....inspirant, des organes internes efficients et moins de courbes indésirables ; ils voudraient également que je soigne ma candidose afin de dégager un parfum plus neutre, moins. . . renfermé... Mais que croient-ils donc ? Moi aussi, j’aimerais être plus agréable à regarder ! Je suis vexée, voilà ! Eux qui parlent aux enfants de leur émotions, se préoccupent-ils des miennes ? Ces émotions que je dois absorber sans relâche alors qu’eux ne savent que faire de ma sensibilité exacerbée ! Je continue ma mission cependant, pour ces précieuses jeunes âmes que sont les enfants pris en charge en mon sein. Je les laisse utiliser à leur guise chaque parcelle de mon être pouvant les aider à déposer leur mal-être ou à tester ma solide présence. Les adultes, je tend à éponger leurs colères, incompréhensions, tensions, impasses afin de les maintenir à flot. Il s’accordent à dire que mes murs sont rassurants, contenants : c’est toujours ça de pris ! Pourtant, je me sens si seule et oppressée ; on ferme mes fenêtres un peu plus chaque jour. Mon prénom, Veranda, ne suffit plus à m’évader même psychiquement. Et pourtant j’avais de l’énergie et de l’humour à en revendre ! C’est décidé, plutôt qu’un incendie n’advienne, je vais demander un bilan de compétences. Ou des vacances..

"Devenir un crabe pour plus de bonheur", MFB

Je suis devenue, récemment, un petit crabe, et, ma vie est faite de diagonale.

En fait, j’ai décidé de refuser le mal : « un point, c’ est tout ».

Je me sens déterminée, et, c’est vraiment bien, forte aussi, et, je me sens seule aussi.
Je me sens responsable : je sais plus que tout, qu’un mot, un geste, un acte, peut détruire une personne pour combien de temps…, je ne sais pas.

Je me suis fixée des règles alimentaires, stop aux grignotages, pour perdre mes kilos en trop.
Je me sens angoissée par moment.

Ce n’est pas simple de changer, de s’affirmer.
Ce n’est pas simple de vivre cette rupture avec mon passé, avec une partie de moi que je quitte.

Quel avenir, quelle rencontre ?

C’est beaucoup de silence aussi, que j’apprécie.

Je me sens plus lucide et adulte. Je me sens heureuse d’être adulte, je ne pourrai plus revenir en arrière, je le ressens au fond de moi.

"Auto-autoportrait", Audrey

Je me présente, je m’appelle Audrey. J’ai les yeux bleu (bien que je les vois vert à chaque fois que je me regarde dans un miroir). J’ai une petite taille. Comme disait Coluche, la bonne taille est quand les pieds touchent le sol. Mon visage est plutôt banal et assez expressif. Ma peau a tendance à être grasse. J’ai de l’acné qui me reste fidèle.
Pour ce qui est de mon style vestimentaire, rien n’est à la mode mais je suis confortable dedans et j’estime que c’est le plus important.

Je suis extrêmement rêveuse. Il y a un monde à l’intérieur de moi et je le garde secret. Dedans, j’exprime tout ce que je ressens. Que ce soient mes peines, mes joies ou mes malheurs, rien n’est oublié.
J’ai l’âme d’une voyageuse, curieuse des autres et de leur histoire. J’aime savoir ce qui leur ai arrivé et surtout qu’ils ont vaincu leurs démons.
Pour l’instant, je n’ai pas encore gagné contre les miens. C’est un long travail qui risque de durer toute ma vie. Et je n’en suis qu’au tout début. En fait, je n’ai pas encore commencer à les combattre. Maintenant, j’essaie simplement de les repérer et de les nommer. J’aviserais ensuite, je pense. Je me dis que je ne suis pas seule, j’ai de l’aide pour ça.
J’ai des pensées positives. Je sais ce que je dois améliorer en moi, ce que je dois accepter et aimer chez moi. J’ai tellement de choses à faire que si je les marque sur un papier pour m’en rappeler, je serais vite découragée. Pourtant, je suis consciente de la tâche à accomplir qui paraît énorme. Je dirais même plus haute qu’une montagne. Heureusement, elle n’est pas inatteignable. Il faut que je le fasse pas par pas, étape par étape.

Mon plus grand rêve, je ne sais pas si j’en ai vraiment. J’ai des objectifs que j’aimerais accomplir avant la fin de ma vie. Je ne sais pas si j’y arriverais mais je me promets que j’aurais tout fait pour.

Les créations des ateliers de création

"Mask Attak 2", Vincent Riot-Sarcey

Si les vivants peuvent être déconfinés, les morts peuvent l’être aussi...



"Dessin", Meido

"Si j’étais un crabe", Vincent Riot-Sarcey

"Sur une diagonale, une rencontre de crabes", MFB

"Chair de crabe en quinconce", l’Ourse

"Portrait", Vincent Riot-Sarcey